Le gouvernement turc a réintégré Ahlat et ses trésors architecturaux dans le récit national, mais son histoire est peut-être plus complexe que ce qui en est montré.
William Gourlay
Fin août, le président turc Recep Tayyip Erdoǧan a réuni son cabinet à Ahlat, près des rives du lac Van, dans les confins de l'Anatolie orientale. La ville d'Ahlat, poussiéreuse et sous-développée, située à quelque 800 kilomètres de la capitale turque, peut sembler un endroit étrange pour réunir des ministres et des responsables politiques. Pourtant, cette ville occupe une place importante dans l'imaginaire national en raison de sa proximité avec Manzikert (Malazgirt en turc), le site de la première grande victoire militaire des Turcs en Anatolie. C'est ici qu'en 1071, le sultan Alparslan de la dynastie seldjoukide a battu une armée byzantine, capturant l'infortuné empereur Romanus IV Diogenes, ouvrant ainsi la voie aux nomades turcs et à la création de leur premier État en Anatolie, le sultanat de Rum.
Outre les batailles médiévales, Ahlat abrite une collection de trésors architecturaux longtemps ignorés, remarquables en soi mais aussi liés au symbolisme qui a poussé Erdogan à entraîner son cabinet si loin d'Ankara. Au sud-ouest de la ville, dans une prairie vallonnée, se trouvent environ 6 000 stèles de pierre, dont certaines remontent au XIIIe siècle. D'une superficie de près de 200 000 mètres carrés, le site seldjoukide de la mezarlık (cimetière) est le plus grand parmi ceux que compte le monde islamique, les pierres tombales révèlent des versets coraniques, des poèmes et des proverbes, ainsi que des motifs géométriques complexes sculptés par des artisans locaux. À la périphérie de la ville et sur la rive voisine du lac de Van, on trouve également un assortiment de kümbets, qui sont de grands mausolées autonomes surmontés de tours coniques qui dominent les toits environnants. Lors de son trajet vers Babylone dans les années 1850, l'archéologue Austen Henry Layard a fait l'éloge du site : « L'artiste et l'amoureux de la nature trouveront tous deux des objets d'étude et de plaisir à Ahlat. »
Les pierres tombales d'Ahlat et les kümbets ont été réalisées à partir de la pierre locale de couleur rouille. Connue sous le nom d'ignimbrite, cette roche est produite lors d'éruptions volcaniques, ce qui donne un matériau de construction tendre et facile à travailler, mais qui durcit progressivement lorsqu'il est exposé au vent et aux intempéries. Le travail de la pierre d'Ahlat est si particulier qu'il a été inscrit par l'UNESCO au patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde. Historiquement, la pierre était extraite des contreforts du mont Nemrut, situé à proximité. Les artisans locaux l'ont longtemps utilisée pour la construction de maisons, de mosquées, de ponts et de kümbets. Ils ont également orné les pierres tombales de délicats reliefs basés sur des motifs organiques, géométriques et calligraphiques. Pendant des siècles, ces techniques ont été transmises, mais aujourd'hui, en raison des changements démographiques et de la disponibilité croissante des matériaux de construction modernes, les techniques de travail de la pierre d'Ahlat sont en net déclin.
Lorsque Layard arriva à Ahlat, le coucher du soleil illuminant le décor, il nota « des minarets penchés et des mausolées pointus émergeant des arbres » lors de son avancée vers le lac de Van. Aujourd'hui, l'approche est moins poétique. L'autoroute E99 longe la rive nord du lac, en direction de la frontière iranienne, et Ahlat, dans sa modernité, ne présente, à première vue, que peu d'intérêt.

Pourtant, les trésors architecturaux d'Ahlat émergent de façon inattendue dans des endroits autrement banals. Au sud-ouest de la ville, entre la cour d'un garagiste et un lieu de mariage, se trouvent les Çifte Kümbetler, deux mausolées imposants datant du XIIIe siècle.. Ces constructions presque identiques, dédiées à deux nobles depuis longtemps oubliés et à leurs épouses respectives, revêtent une forme typique des kümbets d'Ahlat. À la base de chaque kümbet se trouve une tombe octogonale, en forme de cube dont les coins ont été coupés en diagonale. Au-dessus se dresse une tour cylindrique à douze panneaux ornementés, eux-mêmes surmontés d'un toit conique pointu.
T.A. Sinclair, dans son étude souvent citée sur les trésors architecturaux et archéologiques de la Turquie a noté que ces kümbets se distinguent des autres tombes turques (türbe) parce qu'ils sont autonomes, ils sont plus courants en Anatolie orientale. Les plus grands exemples qui subsistent se trouvent à Ahlat. L'Ulu Kümbet est le plus grand d'entre eux. Quelque peu négligé, il se trouve près de la rive du lac Van. Il atteint plus de 20 mètres de haut sur une base de neuf mètres de côté et on pense qu'il date de la fin du XIIIe siècle.
Bien qu'indéniablement turques, les kümbets disséminés autour d'Ahlat révèlent des sensibilités artistiques à la fois proches et distinctes de la grande architecture ottomane d'Istanbul avec lesquelles de nombreux amateurs d'art sont familiers. Ici, pas de dalles de marbre blanc ni de dômes de plomb voluptueux comme dans les mosquées impériales de Sultanahmet. Pour moi, alors qu'une pie vole entre les toits coniques et pointus du Çifte Kümbetler, c'est l'esthétique de la Perse et de l'Asie centrale que j'entrevois. Ce coin au sud-est de l'Anatolie est depuis longtemps une zone de chevauchement des courants politiques et artistiques mésopotamiens, caucasiens, méditerranéens et iraniens. En effet, ce sont les Turcs seldjoukides qui, les premiers, ont conçu la forme du kümbet en Iran, apparemment à partir des tentes coniques qui étaient au cœur de leur mode de vie nomade. C'est là qu'ils ont absorbé les influences artistiques persanes, qu'ils ont ensuite transportées en Anatolie.
Par une journée d'été, il est agréable de se promener sous les noyers ombragés depuis le Çifte Kümbetler jusqu'au cimetière seldjoukide. Layard, qui est arrivé ici dans les années 1850, a écrit : « Nous avons traversé de vastes cimetières, une forêt parfaite de pierres dressées de sept ou huit pieds de haut, de la couleur rouge la plus riche, délicatement et avec goût sculptées d'ornements en arabesques et d'inscriptions dans le caractère massif du début de l'ère musulmane. »
Les pierres tombales, disposées en rangs serrés sur le terrain vallonné, exercent toujours une présence sévère et inquiétante. Au XIXe siècle, Henry Lynch, un voyageur anglais, a établi des parallèles entre ce cimetière et celui du Père Lachaise à Paris, mais pour moi, l'impression dominante est celle des ancêtres des Turcs qui garderaient une sentinelle sur ce coin d'Anatolie, leurs pierres tombales tournées - peut-être avec nostalgie - vers l'ouest, en direction du soleil couchant. La juxtaposition de la beauté naturelle et de l'histoire reste aussi frappante que Layard l'a enregistrée. Les corbeaux volent des pierres tombales aux quelques mûriers qui se dressent au milieu des monuments, et au loin, le mont Süphan, enneigé même en plein été, offre une toile de fond majestueuse.
Bien que Layard ait trouvé Ahlat largement délaissée, les efforts du gouvernement Erdogan pour réhabiliter l'histoire nationale ont ravivé l'intérêt des Turcs d'aujourd'hui pour ces lieux. Erdogan a récemment déclaré : « Depuis que nous avons pris nos fonctions, nous avons considéré qu'il était de notre devoir de faire revivre Ahlat comme une capitale et nous avons toujours agi dans cet esprit. » Assimiler Ahlat à une capitale est peut-être exagéré, mais elle est certainement devenue un lieu de villégiature incontournable pour les Turcs.
En visitant la mezarlık pendant kurban bayram, l'une des fêtes les plus importantes du calendrier turc, j'ai croisé nombre de visiteurs venus de l'ouest de la Turquie. Des pères portant des maillots de foot, qui parlaient au téléphone, tandis que les enfants couraient avec excitation sur les trottoirs. Des femmes portaient des vestes épaisse et leur foulard, malgré la température de midi qui frôlait les 38 degrés, elles marchaient solennellement au milieu des pierres tombales, s'arrêtant pour admirer le travail de la pierre et lire les inscriptions. À l'extrémité est du cimetière, une personne âgée aux cheveux blancs s'est arrêtée pour prier dans une petite mosquée située à côté de l'Emir Bayındır Kümbeti, tandis qu'un petit enfant chantait au soleil et m'aspergeait avec un pistolet à eau. Plus tard, une jeune mariée est apparue dans une robe sophistiquée et étincelante de paillettes bleues, pour poser pour des photos parmi les pierres tombales.
Ce sont les visiteurs turcs qui sont les plus intéressés par la visite du site de la mezarlık d'Ahlat, mais l'histoire de la région révèle un patchwork de diversité ethnique. Dans le dolmuş (minibus) qui m'emmenait à Ahlat, un vieil homme moustachu a levé son portable pour mieux voir l'écran, révélant à tous les passagers le nom de l'appelant : « Aşkım », qui signifie « mon amour » en turc. Il s'est ensuite mis à parler fort, en kurde. Un autre passager m'a dit que la population de l'Ahlat moderne est « hepsi Kürt » (« complètement kurde »). Le nom de la ville elle-même vient de l'arménien, Khlat. Avant l'arrivée des Turcs seldjoukides, le contrôle d'Ahlat, forteresse stratégique située au carrefour de plusieurs routes commerciales, est passé entre de nombreuses mains, du califat d'Omar au septième siècle aux princes arméniens, en passant par les chefs de guerre géorgiens, les chefs kurdes et les émirs arabes. Anecdote historique intrigante : au milieu des années 1240, Tamta Mkhargrdzeli, une femme d'origine arménienne, élevée à la cour géorgienne, mariée deux fois à des émirs ayyoubides et enlevée une fois par des Mongols, a été gouverneure de la ville pendant une décennie.

Cela ne plaira peut-être pas aux nationalistes turcs modernes qui revendiquent leur tutelle de longue date sur l'intégralité de l'Anatolie, mais le gouvernorat d'Ahlat par une femme au patrimoine culturel aussi divers que Tamta n'est pas atypique. Ce n'est qu'au XVIe siècle que les Ottomans consolident la domination turque sur l'ensemble de l'Anatolie. L'historien Gary Leiser caractérise l'Anatolie de la période seldjoukide comme une "salade", où l'interaction des groupes religieux et ethniques et l'effacement des frontières entre eux étaient la norme. Si la victoire des Turcs à Manzikert préfigurait l'islamisation de la péninsule, les communautés chrétiennes indigènes n'ont pas été immédiatement menacées ou forcées de se convertir, certaines d'entre elles ayant même prospéré avec la fin de l'oppression byzantine. Le gouvernorat de Tamta en est un bon exemple.
L'historien de l'époque byzantine Antony Eastmond note dans son magnifique étude de la vie et de l'époque de Tamta que c'est sous son règne que les monuments funéraires d'Ahlat ont commencé à apparaître. Certains ont établi des parallèles entre les pierres tombales d'Ahlat et les inscriptions d'Orkhon créées au VIIIe siècle par les prédécesseurs des Turcs en Mongolie : les Göktürks. Cependant, les inscriptions d'Orkon sont uniquement ornées de l'écriture turque ancienne et ne révèlent aucune des sensibilités artistiques et du génie ornemental apparaissant à Ahlat. Il n'est pas impossible de supposer que les interactions et l'engagement des divers peuples d'Anatolie ont influencé les artisans d'Ahlat et infusé les œuvres d'art qu'ils ont créées. Leiser note que l'« éclectisme » d'autres créations architecturales de la période seldjoukide, telles que la mosquée et le complexe hospitalier de Divriǧi peut s'expliquer par la rencontre d'artisans et de conventions architecturales issus de différentes traditions ethniques et religieuses. Tout comme le contrôle politique et les alliances tactiques ont évolué en Anatolie au fil des siècles, certains artisans se sont déplacés d'une principauté à une autre. Ils travaillaient sur différents projets architecturaux et apportaient avec eux l'expérience, les techniques et l'esthétique accumulées, qui se sont manifestées par de nouveaux modes d'expression artistique et des créations architecturales qui leur étaient propres.
Parallèlement au chevauchement des traditions artistiques, le cimetière d'Ahlat a été pendant des siècles beaucoup plus vaste en raison de la présence de nombreuses tombes chrétiennes. Une seule photo publiée dans le récit documentaire de 1913 sur les églises et les mosquées de l'Anatolie orientale du voyageur allemand Walter Bachmann montre des pierres tombales semblables à celles qui subsistent aujourd'hui, mais qui sont décorées de khatchkar (croix) et dont les inscriptions sont en écriture arménienne. Les pierres tombales chrétiennes ont été détruites depuis, ce qui constitue une perte inexprimable pour le patrimoine architectural et artistique de l'Anatolie.
Malheureusement, cet exemple de destruction du patrimoine en Anatolie n'est pas isolé. L'exemple récent le plus flagrant est peut-être celui de la ville de Hasankeyf, ville majoritairement peuplée de Kurdes sur le cours supérieur du Tigre, elle a été inondée par par les eaux du barrage d'Ilisu en 2020. Une campagne désespérée menée par les habitants, ainsi que l'inscription sur la liste du World Monuments Fund et une tentative de protection du site par l'UNESCO n'ont pas suffi à le sauver. Habitée depuis des milliers d'années et abritant une série de sites archéologiques et historiques, dont une ancienne citadelle ainsi que des mosquées, des ponts et des mausolées datant des dynasties Artuklu, Ayyubid et Akkoyunlu, Hasankeyf semblait avoir une importance historique et artistique similaire, sinon supérieure, à celle d'Ahlat. Pourtant, la ville a été jugée inutile, le gouvernement ayant donné son feu vert à la construction du barrage pour la production d'électricité, il n'a fait que des efforts symboliques pour sauver quelques trésors archéologiques locaux.
Le contraste entre les attitudes des gouvernements à l'égard de Hasankeyf et d'Ahlat souligne que les trésors artistiques ne peuvent être valorisés ou protégés que s'ils peuvent être intégrés dans les récits historiques prescrits par l'État. La mezarlık d'Ahlat a reçu une délégation de ministres du gouvernement et est entrée dans la conscience publique en raison de son association avec les Seldjoukides triomphants et le symbolisme de Manzikert, mais les dynasties qui sont passées par Hasankeyf ont moins de cachet et leurs héritages sont sous-évalués. Ainsi, les pierres tombales d'Ahlat veillent sur le lac de Van, tandis que les monuments de Hasankeyf sommeillent dans les profondeurs du Tigre en crue.

Il est regrettable que William Gourlay, dans son article informatif, continue à mal orthographier le nom de la ville arménienne de Manazgerd ("Construite par Mana") par le toponyme colonialiste de Manzikert/Malazgirt. Même lorsque la célèbre bataille de Manazgerd, entre Byzance et les envahisseurs seldjoukides, est mentionnée, le fait que la bataille ait eu lieu en Arménie est effacé, comme si l'Arménie et les Arméniens n'existaient pas. Depuis plusieurs siècles, la Turquie ottomane et la République de Turquie se sont engagées dans une campagne de transformation des toponymes arméniens (villes, lacs, montagnes, rivières, etc.) en turcs, y compris le Khalat arménien, comme le mentionne l'article. Ils ont même changé le Mont Ararat arménien en Argi Dagh. Ils ne se sont pas contentés de changer les toponymes : ils ont également détruit des églises, des écoles, des maisons, des sculptures, des statues et des joyaux architecturaux arméniens, et même converti des khatchkars ("croix de pierre") arméniens en pierres tombales turques. Aujourd'hui, le dictateur Erdogan a rassemblé autour de lui ses hommes de confiance pour célébrer le génocide des Arméniens de Khalat. Personne ne semble savoir ou se soucier du fait que la Turquie non seulement occupe 90 % de l'Arménie, mais menace désormais, avec l'Azerbaïdjan, l'existence même de la République démocratique d'Arménie, enclavée et de la taille d'un timbre-poste. Quels que soient l'énormité et la perpétuité des crimes, le monde semble pardonner et oublier les crimes continus de la Turquie. Enfin, ce que l'on appelle le "Kurdistan" a été l'Arménie pendant des millénaires. Le sultan génocidaire Abdul Hamid a interdit la désignation de l'Arménie à la fin du XIXe siècle et l'a remplacée par "Kurdistan". Le monde a obéi à ce changement de nom erroné et injuste jusqu'à ce jour.
Nous constatons dans sa biographie que l'auteur William Gourlay a travaillé comme journaliste en Turquie. Dans ce pays, seuls les récits approuvés par l'État sont autorisés à être publiés. Il n'est donc pas surprenant que l'islamisation forcée de l'Anatolie chrétienne soit ici présentée comme le "berceau" de la domination turque. L'invasion de Manazkert en 1071 a marqué le début de l'incursion turque seldjoukide en Asie centrale, qui a entraîné la destruction, le vol, le pillage, le viol, la réduction en esclavage et la conversion forcée à l'islam des chrétiens arméniens, assyriens et grecs indigènes. Les sculptures islamiques en pierre illustrées dans cet article ont été conçues pour imiter, puis remplacer les anciennes et uniques croix arméniennes (khatchkars) qui dominaient le paysage de l'Asie mineure après l'adoption du christianisme par l'État arménien en 301 apr. Jusqu'à aujourd'hui, la Turquie (et maintenant l'Azerbaïdjan) ont assidûment détruit ces anciens marqueurs arméniens afin d'éliminer toute trace de la civilisation arménienne indigène des terres saisies qu'ils occupent. Ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres : Le Nakhitchevan arménien a été nettoyé de tous ces khatchkars et est maintenant occupé en tant que "République azérie".
Je suis d'accord avec Telo, mais il n'y a pas que les journalistes en poste en Turquie dont la production est suspecte. Parmi les autres sources étrangères douteuses, on trouve les archéologues et les historiens. Les archéologues étrangers veillent à ne rien dire/publier que les autorités turques pourraient désapprouver (par exemple, toute mention de l'Arménie/des Arméniens ou le fait évident que l'Urartu est l'Arménie). La même circonspection s'applique aux historiens qui craignent de ne pas être autorisés à entrer en Turquie ou de ne pas avoir accès aux archives du gouvernement turc, lourdement expurgées, s'ils mentionnent les Arméniens. Je connais un journaliste britannique en poste en Turquie qui s'est caché derrière un pseudonyme pour écrire un article dans lequel il mentionnait la présence arménienne évidente depuis trois millénaires en "Turquie orientale".
Mais il y a pire : les médias occidentaux se plient en quatre pour ne pas critiquer la Turquie parce qu'elle est membre de l'OTAN, qu'elle possède la deuxième plus grande armée de l'OTAN, qu'elle héberge les bombes nucléaires américaines à Incirlik et qu'elle pourrait quitter le navire et rejoindre le club de Poutine. Ainsi, les menaces de la Turquie à l'encontre de la Grèce, de Chypre, de la Syrie, de l'Irak et de l'Arménie sont ignorées. Après Israël, la Turquie doit être le pays le plus choyé par les médias occidentaux.
La Turquie a toujours délibérément changé les noms de lieux arméniens en d'autres langues afin d'effacer la présence trois fois millénaire de la nation arménienne.
Cela s'ajoute, bien sûr, aux massacres répétés d'Arméniens et au célèbre génocide arménien de 1915-1923 perpétré par la Turquie.
Par exemple, veuillez consulter cette étude universitaire intitulée "La turquisation des toponymes dans l'Empire ottoman et la République de Turquie".
Lusine Sahakian ("Turkification of the Toponyms in the Ottoman Empire and the Republic of Turkey") cite au moins quatre stratégies employées par les autorités turques pour effacer les noms de lieux arméniens :
1. Traduire la signification des toponymes arméniens en turc
2. Modifier les noms et revendiquer ensuite leurs "racines turques".
3. Donner un tout nouveau nom
4. donner des explications étymologiques turques aux toponymes arméniens.
La déclaration suivante de Kyamil Pacha, grand vizir et commandant en chef sous le règne du génocidaire Sultan Abdul Hamid II : "...Le bon sens nous dit de nous débarrasser de tous ces éléments qui peuvent constituer ...des menaces pour nous à l'avenir...Nous...non seulement ne reconnaissons pas le mot "Arménie", mais nous devons réduire en miettes toutes les mâchoires qui osent prononcer ce mot. Pour atteindre notre objectif sacré, il est donc impératif et la loi de l'État exige [de nous] de rendre tout élément suspect inapte, de balayer à jamais de la surface de la terre cette nation arménienne, de l'anéantir de manière irréfléchie et définitive." C'est ce qu'a fait la Turquie en 1915 lors du génocide des Arméniens.
Le mot "réimaginé" est certainement le plus important.
Le professeur Gourlay est certainement conscient du fait que les lecteurs de TMR comprennent des personnes qui peuvent facilement voir clair dans cet article.
Compte tenu de son "expertise" dans la région, le professeur doit certainement savoir que Khlat AKA Ahlat faisait partie de l'Arménie depuis au moins le 8e siècle. Et que dans le cadre de la "réimagination" turque, tout ce qui était arménien a été pratiquement effacé à "l'époque de la Première Guerre mondiale".
Le professeur doit également savoir que les anciens khachkars arméniens sont en danger en Anatolie et dans les régions du Caucase, malgré la protection supposée de l'UNESCO. Leur destruction et leur appropriation manifeste sont largement documentées.
Les études montrent qu'il est inefficace d'ajouter des faits aux fausses nouvelles, surtout lorsque ces dernières sont propagées par les pétrodollars.
Il est néanmoins vraiment décevant de voir un autre universitaire devenir le pion d'agendas ethnocentriques et nationalistes. On espère, dans l'intérêt du professeur, que le fait de produire des publireportages pour un tel État a ses récompenses. Au diable la vérité !
Chère Mischa,
Je viens de tomber sur votre commentaire.
Vous avez tout à fait raison de dire que le mot clé est « réimaginé ». Le postulat de base de mon article est que le gouvernement turc a manipulé les récits historiques et privilégié certains sites par rapport à d’autres pour faire avancer ses propres intérêts, en manipulant la vérité à des fins de politique intérieure.
L'article indique que le nom de la ville en question vient du nom arménien, Khlat, comme vous le soulignez, et relate l'époque où la région était gouvernée par Tamta, une femme d'origine arménienne, illustrant ainsi que les tentatives de dépeindre la ville comme étant seulement importante pour les Turcs sont erronées et limitées au mieux.
Vous remarquerez peut-être aussi que j'ai décrit la destruction des khachkars arméniens d'Ahlat comme une « perte indescriptible pour le patrimoine architectural et artistique ». À bien y réfléchir, j'aurais dû examiner cet aspect de l'histoire plus en détail, mais je n'ai trouvé que très peu d'informations à ce sujet (étant donné que je ne dispose pas de temps ni de fonds illimités pour entreprendre des recherches).
Vous semblez également suggérer que j'ai reçu des « pétrodollars » en échange de la production de « publireportages » pour le compte de l'État turc. Je déclare catégoriquement que je n'ai reçu aucune somme d'argent, autre que celle offerte par The Markaz Review, pour cet article. Je n'ai pas non plus eu affaire, demandé l'approbation ou été payé par aucun agent, fonctionnaire ou département du gouvernement turc pour cet article ou tout autre que j'ai écrit.
Cordialement